av Plutarque
199,-
"... Pélopidas, fils d'Hippoclus, était d'une famille noble de Thèbes, comme Épaminondas. Élevé dans une grande opulence, héritier dès sa jeunesse d'une fortune brillante, il se livra au soulagement de ceux qui étaient dans le besoin, et qui méritaient ses bienfaits : il voulait montrer qu'il était le maître et non l'esclave de ses richesses. Parmi les hommes, dit Aristote, les uns ne font point usage de leurs trésors par avarice, les autres en abusent en menant une conduite désordonnée ; et ils sont toute leur vie esclaves, les uns de leurs plaisirs, les autres des affaires. Les amis de Pélopidas usèrent avec reconnaissance de sa bonté et de sa libéralité, à l'exception du seul Épaminondas, qu'il ne put décider à accepter une part de sa richesse. Lui-même, cependant, il s'associa à la pauvreté d'Épaminondas, par la simplicité de ses vêtements, la frugalité de sa table, son activité dans le travail, son scrupule à ne chercher les succès qu'à visage découvert. Il ressemblait au Capanée d'Euripide, qui était fort riche, mais auquel sa richesse n'inspirait point de fierté. Il eût rougi de donner au soin de son corps plus que ne faisait le plus pauvre des Thébains. Épaminondas, familiarisé avec la pauvreté, qui était pour lui héréditaire, se la rendit encore plus facile et plus légère par la philosophie, et parce que, dès sa jeunesse, il résolut de vivre dans le célibat. Pélopidas, au contraire, avait fait un brillant mariage ; il avait des enfants ; mais il n'en devint ni moins insouciant d'augmenter sa fortune, ni moins dévoué à tous les instants au service de sa patrie. Il avait perdu de son opulence, et ses amis l'en blâmaient, disant qu'il avait tort de ne point s'occuper d'une chose nécessaire, la possession de ses biens : Nécessaire, oui certes ! mais pour Nicodème que voici, répondit-il en leur montrant un homme aveugle et boiteux..."