av Leon Daudet
345,-
" Né dans le dernier tiers du dix-neuvième siècle et mêlé, par la célébrité paternelle, à l¿erreur triomphante de ses tendances politiques, scientifiques et littéraires, j¿ai longuement participé à cette erreur, jusqüenviron ma vingtième année. Alors, sous diverses influences, notamment sous le choc des scandales retentissants du régime, puis de la grande affaire juive, et des réflexions qui s¿ensuivirent, le voile pour moi se déchira. Je reconnus que les idées courantes de nos milieux étaient meurtrières, qüelles devaient mener une nation à l¿affaissement et à la mort, et que baptisées dans le charnier des guerres du premier Empire, elles mourraient sans doute dans un autre charnier pire. Les quelques exposés qui vont suivre sont ainsi plus une constatation qüune démonstration. On en excusera la forme volontairement âpre, rude et sans ménagement. Ce qui a fait la force détestable de l¿esprit révolutionnaire, et sa suprématie, depuis cent trente ans, c¿est la faiblesse de l¿esprit réactionnaire, rabougri, dévié et affadi en libéralisme. Les abrutis, souvent grandiloquents et quelquefois du plus beau talent oratoire et littéraire, allant jusqüau génie verbal (cas de Victor Hugo par exemple), qui menaient l¿assaut contre le bon sens et la vérité religieuse et politique, ne ménageaient, eux, rien ni personne. Ils se ruaient à l¿insanité avec une sorte d¿allégresse et de défi, entraînant derrière eux ces stagnants, qui ont peur des mots et de leur ombre, peur de leurs contradicteurs, peur d¿eux-mêmes. Ils appelaient à la rescousse la foule anonyme et ignorante, cette plèbe intellectuelle qüil ne faut pas confondre avec le peuple, et qui n¿a été, au cours de l¿histoire, que la lie irritée de la nation. Il n¿est rien de plus sage, ni de plus raisonnable, que le peuple français dans ses familles, ses besoins, son labeur et ses remarques proverbiales. "